Nous lisons dans l’Evangile selon saint Luc : « Soyez miséricordieux comme votre Père est miséricordieux » (6,36). Sainte Thérèse a bien compris cela. Sur la petite voie de confiance et d’abandon qu’elle a choisi d’emprunter, elle s’est laissée émonder par l’Amour miséricordieux du cœur du Père.

Le temps du Carême nous invite à goûter la Miséricorde de Dieu pour que nous devenions spongieux de la Miséricorde de Dieu comme une éponge se gonfle d’eau sous une source abondante pour devenir ce pour quoi elle a été créée.

Nous devenons miséricordieux dans le mouvement même où Dieu nous fait Miséricorde : « Vivre d’Amour, ce n’est pas sur la terre / Fixer sa tente au sommet du Thabor. / Avec Jésus, c’est gravir le calvaire / C’est regarder la Croix comme un trésor » (Poésie 17,4).

La Miséricorde dont sainte Thérèse fait l’expérience dilate son cœur et libère en elle le désir missionnaire afin que d’autres bénéficient de cette même grâce, soient sauvés et goûtent le bonheur de se savoir aimés du Père. C’est le chemin de sa conversion à Noël 1886 où Jésus « fit de moi un pêcheur d’âmes, je sentis un grand désir de travailler à la conversion des pécheurs […] Je sentis en un mot la charité entrer dans mon cœur, le besoin de m’oublier pour faire plaisir et depuis lors je fus heureuse !… » (Ms A, 45v°).

La Miséricorde appelle la Charité. Le cœur spongieux de la Miséricorde éprouvée à l’aune de la croix libère la Charité. Sainte Thérèse l’éprouve lorsqu’elle est alitée et soignée par ses sœurs : «  En ce moment les infirmières […] ne craignent pas de faire deux mille pas là où vingt suffi[1]raient, j’ai donc pu contempler la charité en action ! » (Ms C, 17r°).

La Charité comme fruit de la Miséricorde reçue dans un cœur de pauvre comme celui de Thérèse sur son lit de malade, de souffrance et d’abandon, nous convoque à l’humilité qui nous fait comprendre combien nous avons besoin des autres pour avancer sur le chemin de la sainteté.

Ainsi Thérèse comprend-elle sa vocation de façon limpide : « Oui j’ai trouvé ma place dans l’Église et cette place, ô mon Dieu, c’est vous qui me l’avez donnée… dans le Cœur de l’Église, ma Mère, je serai l’Amour… ainsi je serai tout… ainsi mon rêve sera réalisé !!!… » (Ms B, 3v°).

L’Église se révèle alors comme chemin de sainteté où Jésus nous invite : « Je vous donne un com[1]mandement nouveau : c’est de vous aimer les uns les autres. Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres. » (Jean 13,34).

Sainte Thérèse comprend ce commandement très concrètement. Telle sœur pour laquelle elle n’a pas nécessairement de sympathie : « Jésus me dit que cette sœur, il faut l’aimer, qu’il faut prier pour elle, quand même sa conduite me porterait à croire qu’elle ne m’aime pas […] Et ce n’est pas assez d’aimer, il faut le prouver. » (Ms C, 15v°).

Bonne montée vers Pâques

Père Olivier Ruffray, Recteur du Sanctuaire, pour le numéro de mars de la Revue Thérèse de Lisieux