Le 30 septembre 1898 (en réalité le 10 octobre d’après les notes du Procès), Mère Agnès de Jésus et Mère Marie de Gonzague, prieure en exercice, font paraître une circulaire nécrologique exceptionnellement longue (476 pages!) envoyée à tous les carmels français. Mère Agnès prépare une brochure regroupant plusieurs écrits dont les deux cahiers de souvenirs rédigés par Thérèse, quelques poésies et autres écrits qu’elle intitulera Histoire d’une âme, en lieu et place de cette circulaire. En fait, mère Agnès avait réuni les manuscrits de sa petite sœur (on les appellera plus tard A, B et C) écrits par «obéissance», corrigé les fautes d’orthographe (fréquentes), fait des raccords, supprimé quelques passages, divisé le tout en chapitres.
Des trois destinataires, il n’en restait plus qu’une seule : Mère Marie de Gonzague. Selon l’exigence de celle-ci, on avait complété par des poésies thérésiennes et quelques lettres. Le Carmel redoutait une mévente de ce livre, financé sans enthousiasme par le généreux oncle Guérin. A la surprise générale, une seconde édition fut nécessaire six mois plus tard (4 000) et bientôt une troisième… Ce fut une explosion. Jusqu’en 1956 on compta 40 éditions, sans parler des traductions commencées dès 1901. On en a recensé plus de 50, chiffre toujours dépassé et incontrôlable, car les éditions pirates se sont multipliées.
Ce livre a été un instrument de conversion, de guérisons diverses, en tous lieux de la planète. C’est lui qui a poussé les fervents pèlerins à venir prier la «petite sainte», comme ils disent, sur sa tombe au cimetière de Lisieux. Bientôt un garde-champêtre protègera ce lieu des pieuses dégradations.
Ce n’est qu’en 1956, après la mort de Mère Agnès, qui avait pratiquement récrit les textes de sa sœur, que, Pie XII ayant ordonné de revenir aux originaux, on publia les trois manuscrits autobiographiques.
L’édition critique – phototypie – menée à bien par le Père carme François de Sainte Marie (mort en 1961) avec une équipe de carmélites de Lisieux, fut un événement considérable. Thérèse en sortait «décapée», non édulcorée, enfin elle-même.
A partir de 1969, une équipe prit la suite et continua l’édition critique des 266 lettres retrouvées, des 54 poésies (1979), de 8 pièces de théâtre (1985), de 21 prières (1988) et des Derniers entretiens (1971).
Ce travail (1969 – 1988), qui reçut le Grand Prix Cardinal Grente de l’Académie Française en 1989, devait aboutir enfin à la Nouvelle Edition du Centenaire, en huit volumes (Cerf DDB).
L’œuvre réunie en un seul volume «Œuvres complètes» (Cerf – DDB) fait 1600 pages sur papier bible. L’ensemble fut offert le 18 février 1993 à Jean-Paul II et au Cardinal Ratzinger.